Abstract:
"Le savoir-être prend une place importante dans la plupart des devis ministériels au collégial. Au sein du programme Techniques policières, les aptitudes en lien avec le savoir-être sont particulièrement présentes. Le respect, l’empathie ou l’ouverture d’esprit, par exemple, sont des qualités de l’ordre du savoir-être dont la pertinence pour la profession n’est plus à démontrer. Bien que le personnel enseignant valorise l’enseignement du savoir-être, cela représente un défi de taille. Des facteurs extrascolaires tels que les attitudes développées à la suite d’expériences personnelles ou les valeurs acquises par l’éducation parentale ont une incidence majeure sur le développement du savoir-être. En conséquence, son enseignement tout comme son évaluation s’avèrent complexes. Pour développer diverses dimensions du savoir-être, les étudiantes et étudiants doivent être exposés à des situations authentiques. Or, pour des raisons éthiques, pratiques ou de sécurité, il n’est pas toujours possible d’avoir accès à ces contextes d’apprentissage. Les technologies immersives, telles que la vidéo immersive (VI) 360o à l’étude dans cet essai, montrent un potentiel intéressant en vue de l’enseignement du savoir être. La VI 360o permet de plonger l’étudiante ou l’étudiant dans un environnement numérique réaliste et immersif. Certains auteurs (Della Libera et al., 2021; Pilote et al., 2019) ont tiré des conclusions prometteuses à cet égard. Ainsi, la VI 360o pourrait susciter des émotions, éveiller l’empathie, influencer les attitudes, etc. Toutefois, il demeure difficile de tirer des conclusions claires sur l’efficacité des technologies immersives dans le domaine de l’éducation (Bouchard-Boivin et Dufour, 2023). Tout d’abord, les technologies à l’étude diffèrent d’une étude à l’autre. Ensuite, le contexte pédagogique semble jouer un rôle important quant aux retombées sur les apprentissages. C’est pourquoi, afin de déterminer la pertinence pédagogique de la VI 360o pour l’enseignement de deux dimensions du savoir-être (émotions et attitudes), cet essai a tenté de mesurer l’effet de la VI 360o par une approche quantitative et un devis quasi-expérimental. Une capsule VI 360o dans laquelle la personne participante adopte le point de vue d’une personne atteinte d’un problème de santé mentale a été conçue pour cette étude. Par la suite, 61 personnes du programme Techniques policières ont complété le test Community attitudes toward the mentally ill (CAMI) mesurant les attitudes envers les personnes atteintes de problèmes de santé mentale ainsi que la quatrième version du Differential Emotions Scale (DES-IV) mesurant leurs états émotionnels. Puis, ces personnes ont été divisées en un groupe témoin (visionnement sur ordinateur) et un groupe expérimental (visionnement avec visiocasque) et ont effectué les tests de nouveau. Les données amassées n’ont révélé aucun écart significatif entre le prétest et le post-test, peu importe le mode de visionnement utilisé. Ce résultat peut s’expliquer, entre autres, par la durée, la forme et le contenu de la capsule. De même le devis quasi-expérimental de cette étude comportait certains biais qui ont pu exercer une influence marquée. De plus amples études seront nécessaires pour tirer des conclusions claires sur l’effet de la VI 360o sur le savoir-être. Malgré l’absence d’effet de la VI 360o sur les dimensions à l’étude, cet essai réitère certains constats de la littérature sur le sujet. Notamment, l’influence de facteurs extrascolaires sur certaines dimensions du savoir-être. Cette étude a exposé une influence plus marquée du genre et de l’âge sur les dimensions à l’étude que l’appartenance au groupe témoin ou expérimental. Enfin, plusieurs études (Allcoat et von Mühlenen, 2018; Suh et Prophet, 2018) ont souligné le rôle primordial du contexte pédagogique par rapport aux répercussions des technologies immersives. Les résultats de cette étude peuvent s’expliquer, en partie, par une exposition à la capsule vidéo qui s’est faite sans mise en contexte ni stratégie pédagogique." -- Résumé de l'auteur