Ce rapport représente les résultats d’un projet de recherche-action participative, entamé sur trois ans, portant sur les expériences des jeunes musulman.e.s au cégep. La conception du projet a commencé en 2017, suivant l’attaque à la mosquée de Sainte-Foy. En tant que chercheures principales, nous (Leila Bdeir et Krista Riley) étions aussi conscientes de la présence répandue d’études sur la radicalisation chez les jeunes musulman.e.s, qui risquait de renforcer l’image de cette population comme étant dangereuse. Dans ce contexte, nous cherchions à donner la parole directement aux étudiant.e.s musulman.e.s à notre institution (Cégep Vanier) ainsi que ceux d’autres cégeps au Québec. Nous avons donc proposé le développement d’une démarche de recherche-action participative (RAP) qui visait à mieux identifier les expériences et les besoins des étudiant.e.s musulman.e.s au cégep afin de pouvoir élaborer des stratégies efficaces et appropriées en réponse à leurs besoins. Nous voulions aussi que ces démarches soient activement dirigées par les étudiant.e.s les plus touché.e.s par ces questions, c’est-à-dire les étudiant.e.s musulman.e.s.
Le projet constitue une recherche qualitative sur les expériences des jeunes musulman.e.s au collégial. Nous avons fait des entrevues et des groupes de discussion avec des étudiant.e.s musulman.e.s au Cégep Vanier et, moins nombreux, au Cégep de Sherbrooke et au Cégep de Saint Laurent. Nous avons aussi parlé à des professeur.e.s (musulman.e.s et non-musulman.e.s) au Cégep Vanier. Les entrevues ainsi que les groupes de discussion étaient semi-structurées et d’environ 1-2 heures chacune, menés par les chercheures principales du projet et les chercheures étudiantes. Les questions qui ont servi à guider autant les entrevues que les groupes de discussions ont été élaborées principalement par les étudiantes chercheures et portaient sur les expériences d’islamophobie, d’inclusion et d’exclusion, le sentiment d’appartenance au Collège, les expériences en classe ainsi qu’auprès des paires.
L’analyse des résultats est divisée en sept contextes, notamment : la vie insitutionnelle, la salle de classe, la vie sociale, la salle de prière et l’Association des étudiant.e.s muslman.e.s, et finalement leur vie à l’extérieur des collèges dans le contexte montréalais et québécois. Cette division nous aide à analyser plus en profondeur et avec plus de nuance les rapports différents qu’ont les participant.e.s à leurs collèges et aux environnements plus larges dans lesquels iels vivent, et d’offrir des recommandations ciblées, en fonction des contextes spécifiques. Cette division a aussi servi de structure pour ce rapport.
Les données recueillies lors de ce projet donnent un portrait large et complexe de l’expérience d’étre étudiant.e musulman.e au cégep. Plusieurs témoignaient des moments d’appartenance, de soutien, et de solidarité. Toutefois, on y voit aussi une certaine incertitude quant à la place de ces étudiant.e.s dans leurs collèges. Les étudiant.e.s doivent composer avec des enjeux importants liés à la visibilité, surtout pour celles qui portent le hijab, et l’invisibilité, surtout pour les femmes musulmanes qui ne le portent pas, et encore plus pour celles d’origines non-arabes ou sudasiatiques. Iels sont fréquemment confronté.e.s à des « microaggressions », qui s’avèrent pas trop « micros ». Dans la conclusion de ce rapport, nous faisons appel aux établissements collégiaux et au personnel de ces établissements, même les établissements où les étudiant.e.s semblent avoir de bonnes expériences pour mieux assurer un sentiment de sécurité et d’appartenance pour tou.te.s.