"En 2020, la crise sanitaire mondiale provoquée par le virus COVID-19 a bouleversé la vie du
personnel et des étudiants dans les collèges d’enseignement général et professionnel (cégep).
Tenant compte des marges d’autonomie, dont disposent ces établissements à la suite des
mouvements de décentralisation (1985 et 1993) qui ont rendu nécessaire le remplacement
d’accords nationaux par des accords locaux, l’étude cherche à comprendre comment certains
cégeps ont trouvé des accords pour assurer la réussite des étudiants. Le cadre théorique s’appuie
sur la sociologie des établissements scolaires et sur les concepts de décentralisation,
d’autonomie, d’effet-établissement et d’accord. Le cadre méthodologique privilégie l’étude de
cas et l’analyse de documents. À partir d’entrevues réalisées avec des experts du milieu collégial
et des représentants de cinq groupes (direction, enseignant, étudiant, personnel de soutien et
professionnel) de cinq cégeps présentés comme des cas, la recherche met en lumière le point de
vue des acteurs en distinguant ce qui est commun à tous les cégeps de ce qui est particulier.
Les résultats de la recherche permettent de tracer un portrait historique de l’autonomie des
cégeps. Cet historique permet de contextualiser la gestion gouvernementale de la pandémie,
notamment à travers les assouplissements consentis aux exigences habituelles. Les cinq études
de cas sont présentées et les différentes stratégies choisies par les directions sont identifiées :
chaque établissement a opté pour une gestion différente allant d’une faible utilisation des
assouplissements à une très importante utilisation. Le point de vue des représentants étudiants
est mis en lumière. Les défis et les enjeux rencontrés par les acteurs sont également mis en
exergue ainsi que les débats occasionnés dans les communautés collégiales. Les données
montrent, qu’en dépit du nombre important de défis et d’enjeux, il y a eu très peu de débats et
encore moins d’ententes locales, malgré que ces ententes soient prévues dans la loi de
décentralisation de 1985. Le seul groupe d’acteurs qui en a conclues est celui des enseignants qui
bénéficient d’une autonomie (individuelle et collective) accordée par leurs conventions
collectives, ce qui leur permet de négocier des décisions avec la direction. Les groupes du
personnel de soutien et des professionnels n’ont rien à négocier. Ainsi, ils étaient dépendants de
la direction. Le groupe des étudiants s’est senti globalement délaissé : la réussite des étudiants
dépendait de leur capacité à se réorganiser, à suivre les enseignements, à solliciter de l’aide, à
réussir leurs évaluations, etc. Elle a aussi été dépendante de la stratégie choisie par les directions
et les enseignants. Ainsi, si un effet-direction et un effet-enseignant ont pu être mis en évidence,
il n’a pas été possible d’identifier des effets dus au personnel professionnel, au personnel de
soutien, aux étudiants et aux conseils d’administration, comme on aurait pu s’y attendre. Si de
tels effets avaient été observés, il aurait été possible d’observer un effet-établissement." -- Résumé de l'auteure